Maridan-Gyres

Maridan-Gyres

Atelier du 24/03/2015

Les freins à l’écriture

 

Pourquoi écrire ? Quel intérêt ? Le temps nous est déjà compté alors pourquoi le perdre à coucher des mots sur le papier. N’est-ce pas une tache vaine ? Ce que j’écris vaut-il la peine d’être lu ? Mes phrases ne sont-elles pas lourdes, empesées ? Le message que je veux livrer n’est-il pas insignifiant ? Et d’ailleurs comment savoir quel sens donner aux mots ? N’ai-je pas peur du jugement du lecteur ? Qu’il ne me comprenne pas ou à l’inverse qu’il sache tout de moi, des ressorts de mon âme.

Écrire me dévoile peut-être trop…

 

L’écrivain que l’on rêve d’être

 

Répondre à la question de quel écrivain j’aimerais être est déjà en soi complexe. Oser me donner le statut d’écrivain me semble en effet inaccessible. Sans doute parce que mon stéréotype de l’auteur est puissant. Il ressemble à un génie, il se positionne comme un créateur de monde maniant la langue avec sagacité. Je ne peux rêver de lui ressembler…il me fait peur. Je le vois comme névrosé, solitaire presque antisocial, enfermé dans sa tour d’ivoire de créativité.

Mais si je fais l’effort de m’imaginer en écrivain alors une image floue se fait jour. Je vois une femme, ancrée dans le présent, attentive au monde qui l’entoure, d’une curiosité insatiable qui ne se satisfait pas totalement des règles du genre humain. Elle écrit pour donner vie à des alternatives, pour entrainer ses lecteurs dans la magie de l’imaginaire, pour qu’il se pose des questions avec elle, pour qu’il prenne du plaisir à envisager d’autres mondes possibles. Mais surtout, je vois un écrivain qui vit, qui aime, qui expérimente, qui ne s’enferme pas dans son imaginaire, mais qui au contraire le nourrit en permanence de sa réalité.

En conclusion, je ne sais pas vraiment quel écrivain être, mais je sais quelle personne être pour avoir envie d’écrire.

 

Inspiré de portrait

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Mille vies étaient inscrites sur son visage. Ainsi s’est exprimée ma première pensée lorsque j’ai rencontré Léon. Un regard doux, perdu dans un océan de rides. Il sentait le tabac, l’amsterdamer je crois, et un mélange d’eau de toilette musquée. Il était resté silencieux comme seuls les anciens savaient le faire, ceux qui ont compris qu’il ne servait à rien de courir après le temps, il vous rattrapait toujours…

Gêné par son silence, je n’avais pu m’empêcher de le rompre.

—     Léon, merci de me recevoir. J’ai eu vos coordonnés par Julia, elle pense que vous pouvez m’aider.

J’avais craché cette phrase en une respiration, très conscient de l’acuité du regard du vieil homme sur moi. Il ne prononça pas un mot, mais je compris sans savoir comment que je pouvais m’assoir en face de lui. Avec des gestes lents, mais assurés, il remplit un verre d’eau et me le tendit. Soulagé par cette marque d’attention, je vidais le verre d’un trait. Oh putain ! Ce n’était pas de l’eau, mais un genre de gnole maison à réveiller les morts. Un brasier s’alluma au fond de ma gorge tandis que des larmes menaçaient d’évacuer mes yeux. Et Léon ne prononçait toujours pas un son. Un pâle sourire me sembla étirer ses lèvres, mais je n’en jurerais pas. Il restait là,  immobile face à moi, me pénétrant de son regard intense. Chaque seconde m’ébranlait un peu plus. Je me mis à jouer avec mes mains, nerveusement. Le tic-tac de l’horloge antique accrochée au mur ne cessait d’augmenter mon trouble, jusqu’à ce qu’il devienne intolérable.

—     Alors Léon ! Que dois-je faire ? Je vous explique mon problème ou…

-- Non !

J’étais interloqué. Comment ça Non ? Mais comment pouvait-il m’aider s’il ne connaissait pas les raisons de ma présence ? Ahlala ! Je la retiens cette Julia. Rouge de honte, je me levais précipitamment.

—  Excusez-moi pour le dérangement, je vais vous laisser.

—  Non ! M’intima-t-il tandis qu’il saisissait mon bras pour m’obliger à me rassoir. Bouleversé, je ne comprenais pas, mais qu’attendait-il de moi ? Tout à coup, il prit mon verre pour le remplir. Oh non !, et il le posa devant moi. Hésitant, je le fixais. Alors que je m’apprêtais à boire à nouveau, il éclata de rire.

— Pourquoi acceptes-tu de boire alors que tu n’as pas soif ?

Ce furent les seules paroles que prononçât Léon ce soir-là.

 

Alex 24/03/2015



17/04/2015
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