Maridan-Gyres

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croissant doré 28/05/2014

Croissant doré

 

« La déesse de l’amour imite les mouvements de Diane », écrivait un Latin en intervertissant les lettres pour plus de sureté, un certain Galilée.

Cela ne l’a pas empêché de lui coûter cher. Croissant de lune, d’accord, mais croissant de Vénus, quelle hérésie digne du bûcher ?

Voilà qui remettait en question toutes les vérités de l’église et de la science officielle.

Comment, Vénus présenterait des phrases et le soleil évincerait la Terre qui perdrait sa place au centre du monde ! C’était inacceptable !

Seule la une avait le droit au croissant. Cette lune changeante réglait le calendrier des fêtes, on attendait avec impatience son retour. Oh ! Croissant annonciateur de bonheur  qui dissipe les ténèbres de la nuit, complice des amoureux qui ont juste envie de clarté pour ne pas se perdre !

Toi seul as le droit de grandir et de rapetisser. Croissant de malheur et de joie tout à la fois.

Minidisque doré, tu résumes l’ambiguïté du monde. Symbole religieux pour certains, simple objet de curiosité pour d’autres. Apparition attendue des astronomes, car bien mieux que la pleine lune, tu révèles avec une netteté incomparable les cratères, les ombres des montagnes qui se découpent parfaitement en l’absence d’atmosphère.

Tu as fait la fortune des marchands de Vienne à la suite du lever du siège de la ville. Merci aux Turcs qui nous ont aussi apporté le café.

Le café/croissant a pris une grande place dans  notre monde, à la grande horreur des Anglais et des Allemands qui ne sauraient débuter une journée sans bacon ni saucisses.

Croissant, je veux dire tes vertus, tes rêves et tes tentations. Fausse lumière, qui ne peut trouer les ténèbres, complice des chats qui peuvent partir en chasse, amis des voleurs, assassins et poètes, qui te joue des amateurs de photos dans l’espoir de surprendre la fameuse lune bleue, souvent guettée, rarement observée.

Tu annonces  aussi la lune rousse qui réveille des terreurs ancestrales, qui fait tourner le vin s’après certains esprits crédules. Tu dois bien t’amuser parfois de la bêtise humaine et de son orgueil insensé ! Douze hommes ont foulé ton sol, ont fait un petit tour et sont revenus à la maison. Et alors ? Tu as retrouvé la paix depuis quarante ans. Tu caches toujours une partie de toi, invisible depuis la Terre. Là, aucun humain ne s’y est risqué. Tu prends toutes les formes, quartier, demi-lune, tu dessines ton sillon dans le ciel tantôt à gauche, tantôt à droite.

Vanité de l’homme : croissant fertile devenu désert pour avoir osé t’imiter.

«  Je laisse parfois entrevoir le reste de mon disque, je joue avec la lumière. Je pointe parfois de mes bouts de corne une étoile ou une planète selon mon humeur. 

Petit pâtissier qui additionne les croissants sur le présentoir, tu es très loin de ces considérations. Pourvu que tu vendes tes pâtes, imitations de ma splendeur qui agace les astronomes en éclipsant étoiles et galaxies, peu t’importe. Sot, ignorant qui ne connais rien à mes mystères, je te laisse dans ton, pétrin ! Comme un arc étincelant dans le ciel, j’attends le vrai admirateur qui saura trouver la corde qui me fait vibrer pour frapper au cœur les amoureux, mes seuls vrais amis qui savent, eux, m’apprécier.

Petits croissants de blé, je vous méprise, caricatures grotesques d’un don du ciel que trop peu reconnaissent à sa vraie valeur. Je joue sur les deux tableaux, la Terre, le Soleil, je parcours l’éther dans ma course sans fin. Bien malin qui apprendra mon secret que je garde jalousement pour moi seule. Dans mon orbite variable, je m’amuse à attirer des mers. Je me divertis avec l’eau qui monte et descend, parfois avec la complicité du soleil qui sait si bien m’éclairer. J’ai servi d’alibi, sous ma forme réduite, pour m’opposer à la croix. Une fois de plus, la bêtise humaine s’est manifestée. La Croix du Sud ne saurait se comparer à moi, même dans l’hémisphère austral.

 

Quant aux adorateurs du croissant situés presque dans l’hémisphère nord, je les mets au défi de distinguer la moindre croix dans le ciel !

Pauvres humains vous osez porter vos querelles jusque dans l’espace ! Mes amies les comètes, que j’éclaire à mon tour, étaient censées porter malheur. On les décrivait comme des méduses aux têtes épouvantables, accompagnées de serpents, annonciateurs de calamités. Il aura fallu longtemps à ces ignares pour comprendre leur vraie nature.

J’adore les feux d’artifice qui poudroient le ciel et épouvantent encore quelques terriens attardés. La comète va traverser la Terre, sauve qui peut, c’est la fin du monde !

Humains, êtes-vous vraiment libérés de vos superstitions ancestrales ? Je n’entre dans aucune constellation, fabrication arbitraire, je ,’ai pas d’influence sur vos destins personnels. Mon action se situe à une autre échelle. Avec moi, c’est une affaire de tout ou rien ! Je ne fais pas dans le détail ! Même sous la forme de croissant, j’existe en entier et ma force d’attraction n’en est pas diminuée. Gare aux imprudents qui ne tiennent pas compte des marées.

C’est ma revanche sur votre planète qui a ralenti ma rotation. Je lui rends la monnaie de sa pièce. Je change de forme à ma guise, c’est l’or de mon éclat en forme de corne que je préfère. D’ailleurs, n’existe-t-il pas une ville qui me rend hommage ? La corne d’or d’Istanbul. Pour une fois, les humains ne se sont pas trompés sur mon compte ! Adieu petits humains, je vous laisse attablés à vos petits déjeuners avec croissants ou non, peu m’importe ! »

 

Daniel 28/05/2014

 



06/06/2014
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