Maridan-Gyres

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La P’tite Lolotte

Il était une fois une toute petite fille adorable et espiègle, très différente des autres. Charlotte habitait une grande ville de province. Elle était la cadette d’une famille nombreuse, mais également la plus jeune des cousins et cousines. A son grand désespoir, elle était de toute petite taille. Le médecin de famille avait annoncé l’année dernière qu’elle ne grandirait guère et qu’à l’âge adulte elle serait « haute comme trois pommes ». Charlotte ne l’avait pas cru cet imbécile de docteur, elle savait, elle en était convaincue, un jour elle surprendrait tout le monde, elle grandirait à vue d’œil et serait aussi grande que les belles dames des magazines de mode de la salle d’attente !


C’était la veille des grandes vacances tant attendues par Charlotte. Depuis des semaines elle comptait impatiemment les jours et préparait soigneusement la petite valise de ses fidèles compagnons. Et oui, comme une vraie petite maman, elle était attentionnée et pensait à tout, Ploom son bébé orang outan avait besoin de sa casquette et de ses lunettes de soleil, Etoile le petit rat de l’opéra ne devait pas oublier sa paire de pointes neuves et ses pinces à chignon…
Demain, elle prendrait le car avec Ploom et Etoile, direction la campagne, pour rejoindre ses chers papy, mamy et cousin Jules dans le petit hameau de Fourtout.


Le grand jour est enfin arrivé ! La petite citadine a voyagé toute la journée dans cet immense car, elle aperçoit maintenant, au loin, ses grands-parents et son grand cousin qui agitent les bras. Les retrouvailles annuelles sont chaleureuses, les deux vieux fermiers chérissent ce petit bout de fille, qui le leur rend au quintuple. A son arrivée au monde, Charlotte était si minuscule et si fragile que son papy s’était empressé de lui fabriquer un joli petit berceau en bois pas plus grand qu’une boîte à chaussures.


Juchée sur les épaules de Jules, la voici lancée dans une chevauchée fantastique à travers les champs de blé. Que c’est chouette de dominer le monde, d’avoir une vision à perte de vue et de ne pas risquer de se faire écraser par les autres. Que c’est agréable cette douce brise qui caresse ses joues rondes et soulève ses boucles dorées. A l’intérieur du sac à dos de Charlotte, l’orang-outan et la danseuse rient aux éclats, ballotés par toutes ces secousses.


Subitement patatras !!! La joyeuse équipe éprise de liberté s’affale au sol. Dans sa course effrénée, Jules n’a pas pu voir Simplet, qui accroupi dans le champ ramassait un piège posé par un braconnier.
Simplet était très connu à Fourtout, il était aimable et serviable avec tout le monde, même si beaucoup de villageois se moquaient de lui, ricanaient dans son dos, ou le traitaient de « fou du village ». Il ne s’en vexait jamais, puisqu’il ne s’en rendait pas compte.


Charlotte se mit à pleurer à chaudes larmes.
- Qu’y a t-il ma P’tite Lolotte ? Tu as bobo quelque part ?
- Non Jules ! Moi je n’ai rien ! Mais regarde, Etoile est cassée en mille morceaux. Elle ne pourra plus danser dans la boîte à musique ! Il faut faire quelque chose pour elle ! Jules, s’il te plaît !!!


Jules était navré, il se sentait responsable de la tristesse de la petite. Il la prit tendrement dans ses bras pour la réconforter.
De son côté, Simplet se mit à sangloter en silence. C’était un grand sensible, il était sincèrement atteint par le désespoir de Charlotte. C’est alors que la légende autrefois contée par son arrière-arrière grand-mère lui revint en mémoire. Il y a très très longtemps, un lutin avait dissimulé au fin fond d’une grotte secrète de la forêt de Farfouille un miroir en forme de cœur au pouvoir magique. Ce miroir exhaussait les vœux, mais seulement ceux qu’il jugeait dignes de l’être.
Charlotte reprit espoir, elle sécha ses larmes d’un revers de manche. Son cousin, quant à lui, était plutôt sceptique, il n’y croyait pas vraiment, mais pour sa Lolotte, il était prêt à tout.

Les animaux des champs, apitoyés par le drame qui venait de se produire au milieu des épis de blés se concertèrent en urgence pour rassembler toutes informations utiles à propos de la grotte secrète, et en trouver l’itinéraire. Chacun avait autrefois eu connaissance de cette légende qui avait circulé de bouche à oreille, personne ne la connaissait entièrement, seulement quelques brides. Les uns après les autres, ils prirent la parole : l’hirondelle, le mulot, la coccinelle, le lapin de garenne, le moineau, la fourmi, le renard… Chaque souvenir permit de reconstituer le puzzle, et donc de localiser la mystérieuse grotte.
Charlotte trépignait d’impatience de se mettre en route en quête de ce précieux miroir. C’est ainsi qu’un long cortège escorta les trois enfants vers la forêt de Farfouille.


Seulement, personne n’avait remarqué qu’ils avaient été épiés par Narcisse, le fils du maire. Ce dernier avait tout entendu et sans hésiter une seule seconde, avait déjà pris une large avance sur le cortège.
Il arrive à la grotte complètement essoufflé, y pénètre et fouille fébrilement partout dans les moindres recoins et finalement découvre le miroir empoussiéré.


- Oh beau miroir, fais de moi le plus bel homme de la Terre !
Tout à ses pensées tournées vers sa nouvelle apparence irrésistible et inégalable, Narcisse quitte la grotte en courant, trébuche sur une branche morte, et fait des roulés-boulés dans les ronces. Les épines lui lacèrent profondément le visage lui laissant à vie d’horribles cicatrices.

La toute petite fille arrive à son tour devant la grotte accompagnée de tous ses amis. Durant l’interminable marche, Charlotte s’est rendue compte qu’en perdant son jouet préféré, elle a gagné la plus belle chose au monde, celle que l’on ressent avec le cœur : l’amour de ses amis.
Aussi, lorsqu’à son tour elle se trouve face au miroir en forme de cœur, elle lui demande:
- Oh beau miroir, peux-tu s’il te plait donner l’intelligence à Simplet ?
Son vœu est immédiatement et à tout jamais exhaussé.

Simplet passe lui aussi devant le miroir magique.
- Oh beau miroir, peux-tu s’il te plait donner à Charlotte une taille aussi grande que son cœur l’est ? Son vœu est immédiatement et à tout jamais exhaussé.


Jules se place lui aussi devant le miroir.
- Oh beau miroir, merci de tout mon cœur pour Lolotte et Simplet !
Le miroir récompense sa bonté en lui offrant, immédiatement et à tout jamais, des mains en or capables de réparer la petite danseuse de Lolotte.

Le plus beau cadeau que l’on puisse se faire est de faire le bonheur de l’autre.

 

 

 

Nadège



06/08/2013
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