Maridan-Gyres

Un vol planant

Je m’étais assoupi, langoureusement étendu sur mon transat, faisant le lézard avec délectation. Ah ! c’est comme ça que je conçois la vie, la douceur de vivre sous le soleil, un sentiment de liberté et de plénitude que je n’avais hélas le bonheur d’éprouver qu’en vacances. Sentir la chaleur de cet astre béni sur ma peau me remplissait d’un bien-être à nul autre pareil. Une libellule me tournait autour, j’oubliais tout.

- Mais mon instant de paresse fut de courte durée. J’entendis un pas précipité dans l’allée, un caillou ricocha et je vis arriver mon voisin.

- Je viens te chercher, dépêche-toi. Arrête de flemmarder, j’ai besoin de toi.

- Ah bon ? pour…?

- Eh bien voilà, je vais tourner une pub pour un site touristique et il me faut quelqu’un qui sache manier le parapente. Alors j’ai tout de suite pensé à toi.

- Mais, tu ne vois pas que tu me déranges là ? Une pub ! pourquoi pas un roman fantastique tant que tu y es ? Non, non je ne me sens pas de la trempe du héros de service. C’est non ! Et puis,  tu sais, il y a très longtemps que je n’ai pas pratiqué. Au risque de te paraître niais, je ne sens plus du tout capable de me laisser emporter dans les airs.

- Tu as oublié nos folles escapades on dirait. Allez fainéant, bouge-toi, rends-moi ce service.

Je finis par céder à son insistance. Mais arrivé sur place, une fois harnaché, je fus pris d’un tremblement irrépressible. Je ne pouvais plus reculer, au bord du malaise je dus le prendre sur moi. Je m’élançai dans le vide, fermant les yeux et aussi la bouche histoire de ne pas, en plus, gober une bestiole au passage, je sais que la nuit le coin est plein de lucioles, le jour on ne les voit pas…Ce fut la descente aux enfers, la chute au fond d’un gouffre.

 Je ne garde pas de souvenir du déroulement de mon exploit, en tous cas quand je fus de retour, mon ami me félicita, je m’étais dépassé selon lui et le film serait génialissime ! Encore heureux.

ORANE