Maridan-Gyres

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Le conte de Viviane (revu et corrigé)

Il était une fois, il y a bien longtemps, l’histoire que je vais te conter, ô joie de ma vie, remonte au début du monde. Imagine, ma tête folle, qu’il n’y avait rien. Mais rien de rien ! Tout était noir. Dieu dormait depuis longtemps d’un sommeil profond… et puis voilà que peu à peu, il se mit à rêver… et en couleur ! De belles images multicolores se mirent à tournoyer comme des éclairs. Dieu sourit et se réveilla.

Il fut déçu de se retrouver dans tout ce noir… Et il s’ennuya très vite. Alors, il se gratta le front, et fit : hum ! Hum ! Et il commença par fabriquer une foule de boules qui se mirent à tourner dans l’univers : des astres, des planètes. Elles étaient blanches, dorées, rouges, brunes. Il joua avec elles comme un petit fou, un certain temps, comme à la pétanque. Mais, il finit par s’ennuyer. Et puis ces boules n’étaient, malgré tout, pas assez colorées… et comme mortes.

Alors Dieu se gratta à nouveau le front et réfléchit.

 

Il finit par s’intéresser à l’une de ces boules, qu’il avait placée en un lieu propice à la vie, ni trop froide, ni trop chaude, illuminée par un soleil, qu’il appela « Terre ». Elle allait lui servir de laboratoire ô ma curieuse.

Il créa le bleu des océans après le bleu du ciel. Cela contrastait joliment avec le rouge, le brun, le gris des continents. Dieu, ravi, applaudit, et il partit décorer d’autres planètes aux quatre coins de l’univers…

 

Cela prit du temps, tu dois bien t’en douter, ma toute petite. Et puis Dieu revint considérer son œuvre, pour se reposer.

 

Ô désastre ! Il resta bouche bée, les yeux écarquillés. Les végétaux s’étaient mis à grandir, grandir, ô ma petite fée, et avaient tout recouvert… et menaçaient même la survie de la planète presqu’asphyxiée.

 

Dieu réfléchit, se gratta le front… il se dit qu’il fallait limiter la croissance de ces plantes et alors, il imagina les herbivores. Ils allaient dévorer les plantes et rétablir ainsi l’équilibre. Dieu, content de lui, s’en alla ailleurs, recréer d’autres terres. Quand il revint enfin à sa Terre laboratoire, ô ma toute douce, ses yeux s’arrondirent. Les herbivores avaient bien prospéré, si bien qu’ils avaient dévoré presque tous les végétaux… et qu’ils étaient en train de mourir de faim. Et ils n’étaient pas content, les végétaux ! Ils se plaignaient de leur triste sort ! Ils ne pouvaient se défendre contre ces gros abrutis de ruminants… et les herbivores eux de se plaindre de la raréfaction de la nourriture.

 

Bref ! Ma petite fille bruyante, ils faisaient un bruit pas possible ! Dieu se boucha les oreilles, effaré. Puis il réfléchit encore, se frotta le menton… et pour les mettre d’accord, créa des carnivores. Ils allaient, croyait-il, rétablir l’ordre en mangeant les herbivores qui mangeaient les plantes. Et il repartit un peu vexé. Il avait fort à faire ailleurs. Il lui fallait surveiller de multiples planètes et d’autres mondes. Quand il revint pour se reposer et admirer sa Terre laboratoire, il fut à nouveau accablé de plaintes. Ô ma petite curieuse ! Cette fois, les herbivores se trouvaient décimés. Les carnivores prospéraient trop… et ne s’entretuaient pas suffisamment. Misère ! Dieu était excédé ! C’est alors qu’il imagina l’homme ; il le fit à son image : une créature bipède, c’est-à-dire qu’il se déplaçait sur ses jambes, et qui avait une main préhensible. C’est-à-dire qui pouvait saisir, comme toi, ô ma petite fille adroite, entre pouce et index avec tant de gourmandise, le bonbon de sa boîte.

 

Mais Dieu fatigué, un peu énervé, pressé, appelé par d’autres mondes en difficulté ; partit avant d’avoir doté l’homme de l’intelligence. Peut-être même, mon aimée, que Dieu se méfiait déjà de l’homme. Il pensait que le peu d’intelligence qu’il lui avait donné lui suffirait à dominer les carnivores, et puis  il avait les mains, lui, propres à saisir, à manipuler, à fabriquer…

En fait, ô ma petite fleur, l’homme n’était guère plus qu’un singe !

 

Dieu repartit donc dans quelque coin de l’univers où les choses ne se passaient pas mieux que sur Terre…

 

Oui, ma toute chérie ! Dieu n’en pouvait plus de soucis et de labeur… Il croyait cependant que tout allait enfin pour le mieux sur sa planète laboratoire. Il pensait avoir imaginé la meilleure chaîne alimentaire qui soit. L’homme tuait les carnivores, qui mangeaient les herbivores, qui mangeaient les plantes… Et Dieu sourit enfin ! Mais lorsqu’il revint encore sur sa planète Terre chérie, ma petite souris, il fut bien déçu ! L’homme l’accueillit plein de ressentiment avec sa femme et ses enfants, nus comme des vers, tremblant de faim et de froid.

-          Eh ! Dieu ! Qu’espérais-tu ? Tu nous as créés sans force… Nous n’avons ni les griffes ni les crocs des carnivores, nous ne courrons pas aussi vite que la plupart des herbivores. Nous n’arrivons pas à les attraper… Nous ne mangeons que des racines, des végétaux quand les gros mangeurs d’herbe nous le permettent, ou des charognes qu’il nous faut disputer à des animaux bien plus forts que nous ! À quoi nous servent nos mains et notre bipédie ? Regarde, rien n’a changé. Bientôt, il n’y aura plus d’herbivores… Qu’allons-nous devenir ?

Dieu, ô ma petite maligne, fut consterné et honteux. Il se gratta longuement le menton, car il hésitait… Il soupira, car il se sentait quand même fautif. Alors il appela le chien et le cheval, parmi les animaux sauvages : un carnivore et un herbivore. Les pauvres ! Ils ne pouvaient pas désobéir à Dieu, eh ! oui, ma pauvrette, c’est ainsi ! Les puissants ont toujours raison.

 

-          Tiens ! dit-il. Je te donne les jambes rapides du cheval et les crocs du chien. Ils seront tes alliés. Je le veux… et puis après… Dieu hésita un long moment… Je te donne l’intelligence, elle va te permettre de dominer toute la création, dit-il en soupirant.

Peut-être, ô mon adorée, dans sa sagesse savait-il  ce qui risquait de se passer. Que l’homme serait le pire des prédateurs, et qu’il allait à son tour compromettre la vie de la planète… Mais bah ! À l’échelle humaine, cela prendrait du temps… et puis tant pis…

 

Dieu comprit que tout était un échec, et il repartit en maugréant. Peut-être est-il endormi à nouveau, plongé dans ses rêves colorés plus agréables que la réalité. Mais depuis ce temps, le chien est l’ami fidèle de l’homme. Et il n’oublie jamais, LUI, le pacte conclu sous les ordres de Dieu ni le cheval d’ailleurs.

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Et le brave chien, lié par sa promesse, lèchera la main qui l’a battu, le cheval fougueux acceptera la selle et le licol.

 

N’oublie pas  cela, ma sensible petite fille, quand tu les rencontreras. Montre leur respect et affection. Sans eux, que serait-on devenu ? Et ils ont bien du mérite à continuer à aimer les ingrats que nous sommes.

 

Viviane - 1er mai 2014



22/05/2014
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