Maridan-Gyres

Maridan-Gyres

Le polar de Viviane

Il tourne la poignée… Heureusement la pleine lune éclairait… Il connaissait les lieux, et savait se diriger. Il tendit l’oreille. Pas de bruit, elle devait dormir, abrutie par ses habituels comprimés, à moins que ce ne soit par l’alcool !

Face à lui, la porte de la salle à manger bureau… Il tire sa lampe électrique pour mieux se diriger. Ce n’était pas le moment de faire du bruit…

Dans la salle, derrière un tableau, l’attendait le coffre. Il fallait espérer que la vieille folle n’avait pas changé le code. Il commençait à faire le numéro quand derrière lui, il sentit un mouvement.

Trop tard !

Un grand coup sur la tête… et ce fut fini.

Le lendemain quand elle s’éveilla, la tête lourde, elle alla à la cuisine. La porte ouverte l’interpella. Elle pensa au coffre, se précipita dans la salle… et buta sur un corps étendu, le coffre ouvert !

Elle ne mit pas longtemps à reconnaître son frère ! Avec qui, elle était fâchée.

 

Elle appela la police, en tremblant. Une voiture arriva. Le gendarme Laurent, sur les lieux, trouva une femme qui semblait éplorée. Oui, elle avait trouvé le corps à son réveil. L’arme, un très lourd tisonnier gisait près de la victime.

Pas d’empreinte de pas, sauf ceux de la victime et de l’habitante. Le gendarme dubitatif prit l’arme et la rangea comme pièce à conviction.

 

Non, elle n’avait rien entendu. Elle avait le sommeil lourd. Ben, elle ne fermait pas sa porte, à quoi bon ? Qui savait qu’elle avait un coffre ?

-          Euh ! La famille… peut-être s’était elle vantée dans ses conversations, elle aimait bavarder.

-          Y avait-il beaucoup d’argent ?

 

Gêne de la femme :

 

-          Un peu…

-          Combien ?

-          Reste d’un héritage plus quelques bijoux

-          Des preuves ?

-          Ben, les papiers étaient dans le coffre, mais le notaire pourra témoigner.

 

Le gendarme partit et enquêta un peu plus. Il apprit que frère et sœur étaient fâchés depuis l’héritage. Même un procès ! Le frère s’estimant lésé. Une assurance pour les bijoux… Femme de mauvaise réputation. Buvait, avarice reconnue, fâchée aussi avec sa fille et ses petits-enfants...

Aurait-elle pu tuer son frère et faire croire au vol ? Pas d’empreinte sur le manche, sauf les siennes, mais non effacées. Possible qu’un autre l’ait tenu avec des gants... Ou elle ? Mais était-elle assez maligne ?

 

Mise en accusation quand même, la disparition du frère l’arrangeait… Plus de procès pour elle, tranquille ! N’avoue pas. Non, elle dormait, n’avait rien entendu, prenait des comprimés. Vérifié, oui. Alors ?

 

Autre piste, la famille proche. Interrogation de la fille. Insulte et discrédite la mère, avare égoïste, bien fait pour elle !

Enfin, enquête sur un petit fils, apparemment parti juste après le drame… Mauvais garçon, ami de l’oncle quand même. Complot…

 

Conclusion : les deux d’accord pour le vol, mais le jeune ne voulaient pas partager. Après tout c’était sa grand-mère, l’argent lui revenait… avait attendu l’oncle et…

pourquoi était-il allé au cimetière ce soir-là ? C’était son copain Louis qui avait parlé d’une fête possible, parmi les tombes… Il avait de drôles d’idées ce Louis… C’était un gothique ! Vêtements noirs, cheveux dressés en épis, de hérissons pleins de gel, yeux charbonneux, lèvres noires…

Il ressemblait à un vampire ! Mais on riait bien quand il faisait peur aux bourges indignés. Le cimetière, oui. Rendez-vous à vingt-trois heures ! Il fallait  la nuit noire… On devait venir avec des lampes… des bougies… On mettrait un peu d’animation et on réveillerait les morts.

 

Pour l’instant, il était seul, à se les geler. À vrai dire l’environnement laissait à désirer ! On devinait à peine les tombes, mausolées, le vent gémissait dans les cyprès qui veillaient ce champ de repos… Le temps s’écoulait bien lentement et malgré lui, les histoires de revenants, de maléfices, le hantaient.

 

Tiens, un bruit ! Enfin, une auto. Il risque un œil par la grille du cimetière. Bizarre, pas de phares. Les copains exagéraient ! C’était dangereux ! Il se préparait à les interpeller et à s’avancer quand des portières ouvertes quatre silhouettes s’extirpèrent du véhicule…

 

Ce n’étaient pas des jeunes hommes, à leur allure. Non, un instinct le fit se cacher contre le mur du cimetière… car les quatre tiraient du coffre un sac… contenant manifestement un corps…

Oh ! Flûte ! La réalité dépassait tout ce qu’il avait imaginé… Les hommes parvinrent à couper la chaîne, avec des cisailles, qui fermaient le portail du cimetière…

 

-          Cela va les inquiéter. Dit une voix

-          Mais non. Ils sa vent que parfois des couillons de jeunes viennent jouer au sabat. J’ai tout prévu. Allée 35 – tombe 2S – vous verrez, on ne risque rien.

 

Les quatre hommes passèrent près de lui en ahanant !

 

-          Seigneur, qu’il est lourd, celui-là. Le prochain, choisis-le plus maigre !

 

Ces mots glacèrent d’effroi le jeune Luc, témoin involontaire de la scène macabre. Il se blottit derrière une grande tombe, surmontée d’une chapelle… L’ange qui la coiffait semblait ricaner avec un rayon de lune qui jouait à cache-cache. Pourvu que les autres ne viennent pas ! Mais déjà les quatre hommes revenaient rapidement, Luc était trop terrifié pour essayer de distinguer leurs traits… et puis, la nuit était profonde et la lune parfois cachée par des nuages… Non, il resta blotti à trembloter jusqu’à ce que le bruit du moteur du véhicule disparaisse dans le lointain…

Il observa alors les alentours et écouta les bruits de la nuit avant de décider à se redresser… Pas de copains en vue… C’était une blague ! Mais que faire ? Il n’avait pas rêvé. La tombe existait-elle ? Il ne risquait plus rien, les affreux étaient partis. Avec sa lampe électrique prévue pour le « bal des vampires », il chercha l’allée 34. Elle était dans la partie la plus ancienne… Celle qui avait le plus de mausolées, tombes maison… L’emplacement 2S, justement.

 

L’homme se cachait derrière la haie, il était nerveux et avaient fumé plusieurs cigarettes. Il attendait la nuit noire. Il avait surveillé la petite maison, heureusement isolée, les va-et-vient de l’habitante… Cette charogne ne se coucherait donc jamais ? Pourtant, il connaissait ses habitudes. Cette grosse morue d’habitude se couchait avec les poules. Manque de pot, ce soir, elle trainait dans son salon… à moins qu’elle ne soit endormie dans son fauteuil… Il savait qu’elle biberonnait peut-être à cause des soucis. Bien fait ! Qu’elle crève ! Cela lui simplifierait tout. Il tira nerveusement quelques bouffées de sa cigarette. Et l’autre ? Ce petit con devait pourtant le rejoindre… Ah ! La jeunesse, mais s’il croyait qu’il allait avoir sa part, il se mettait le coude jusqu’à l’œil ou mieux, c’était comme pisser dans un violon…

Enfin la lumière disparut dans la maison. Il attendit encore un quart d’heure.

 

-          Faudrait pas que je tombe sur cette vieille peau ! Mais elle a dû avaler ses comprimés pour dormir. Le premier sommeil est le plus profond. Et l’autre ? Merde alors ! Il ne viendra plus. C’est au vieux à faire l’ouvrage. Quelle jeunesse ! ça parle, ça parle… mais pour agir, psitt, plus personne. Ah ! Il est beau le monde !

 

Il observa les alentours et écouta les bruits de la nuit avant de se décider à se redresser. Il tira un bas nylon qu’il enfonça maladroitement sur sa tête.

 

-          Bon Dieu de dieu ! Je sais pas comment ils font dans les films ! Mais faudrait pas – sait on jamais - que la vieille bique me reconnaisse si jamais, elle se levait. À cet âge, on a la vessie faible !

 

Il rejoignit la porte de la cuisine en enfilant une paire de gants en latex. Il savait de source sûre que cette porte restait toujours ouverte! Quelle conne !

 

Il tourna la poignée et s’arrêta sur le seuil. Les portes avaient grincé légèrement. Eh ! Merde ! Cette poufiasse n’était même pas capable d’entretenir la maison, d’huiler une porte. M’étonne pas, a toujours été  une vraie couleuvre ! Quand je pense à son pauvre mari ! Il a dû en avaler de belles. Avec lui, peut-être aurai-je pu m’entendre…

 

Pas de bruit… Non, elle dormait d’ailleurs, il lui sembla entendre des ronflements… Il pouvait allumer sa lampe. Il connaissait les lieux, mais la salope désordonnée pouvait laisser trainer des objets hétéroclites, véritables pièges…

Justement ce tabouret n’était pas à sa place… il le contourna en maugréant. La porte de la salle à manger lui faisait face. Il regarda sa montre, non, l’autre ne viendrait sûrement pas, le petit salaud ! Tout le travail pour lui. Il ricana, mais le bas se colla sur sa bouche. Merde de merde ! Elle dort, elle ne viendra certainement pas me déranger ! Il arracha rageusement le bas de son visage, le rangea dans sa poche. Il ouvrit la porte avec précaution. Non, elle ne grinça pas celle-là. La lumière de la lampe se promena sur le mur. Là, un tableau ! Oh pas un Picasso ! Bien sûr, mais une pseudo œuvre qu’on trouve au marché. Ah ! Ah ! Tu parles ! Un vrai goût de chiotte ! M’étonne pas ! Il décrocha le tableau. Il était là, le coffre. Elle croyait la pétasse que son affreux tableau le dissimulerait ! D’ailleurs, il savait où il était. Elle n’avait pas beaucoup changé le décor !

Et je suis sûr qu’elle n’a pas dû changer le code ! Trop compliqué pour elle. Tant mieux pour moi. Ses yeux brillaient d’excitation. Il y était ! Il oubliait tout, déjà il essayait les chiffres qu’il connaissait. Ah ! Il allait devenir riche ! La belle salope allait crever de rage. Il ne sentit pas l’ombre légère qui se déplaçait derrière lui, ou trop tard, car au moment du « clic » qui ouvrait le coffre, un formidable coup de tisonnier sur le crâne l’endormit pour toujours.

 

Le lendemain, elle sortit de son lourd sommeil artificiel, la bouche pâteuse. Seigneur, encore un jour, si long à tirer ! Se lever, faire sa toilette, se vêtir. Tout lui pesait. Que faire ? La famille… Bof ! Sa fille unique était loin, et leurs rapports, mieux valait ne pas en parler.

Pourtant, les enfants ne doivent-ils pas tout aux parents ? Les ingrats ! Pourquoi croyaient-ils qu’on les faisait ? Pourquoi s’emmerder avec ces mômes à élever si ce n’était pour ne pas être seul plus tard, et pour être servis en cas de besoin…

Oui, les enfants, source de déception… de vrais serpents, scorpions… Elle maugréait et insultait sa fille.

Laisser sa mère ! Devrait avoir une loi pour les obliger à servir leurs parents. Oui, servir. Je voudrais la voir à genoux devant moi cette putain. Mais elle n’aura rien ! Dommage, je verrai pas sa tronche à ce moment. Faudra que je dépense tout. Pas un sou.

 

Tout en imaginant des représailles sanglantes, elle était descendue dans sa cuisine. Elle remarqua tout de suite la porte de la salle à manger ouverte… Les sens en alerte, cette fois, elle se précipita dans la pièce… Le cri s’étrangla dans sa gorge. Le coffre était grand ouvert… vide…

 

-          Merde ! Pas possible ! Qui ?

 

Elle se précipita et buta sur le corps étendu. Un nouveau sursaut d’effroi. Mais enfin, que s’était-il donc passé ici ? Elle se décida à s’approcher de ce cadavre, l’homme étendu, face contre sol, ne lui semblait pas inconnu… Elle se pencha, un peu dégoutée, mais c’est Paul ! Ça alors ! Mon frère ! Que faisait-il là ! Ses pensées se heurtaient dans sa tête. Enfin, elle alla au téléphone et appela la gendarmerie.

 

-          Allo ? Venez vite, y a un mort chez moi !

-          Ah ! 24 rue des oliviers à Maurion ! Venez vite ! J‘ai peur. Vous imaginez si l’assassin est encore là, ou dans les parages.

 

Peu après la voiture des gendarmes se présentait devant le portail. Le capitaine de gendarmerie, Legrand, suivi d’un subordonné, Martin, entrèrent dans le jardin, avec précaution. La femme les attendait sur le pas de la porte, tourneboulée.

 

-          C’est là, dans la salle à manger ! Je l’ai trouvé ce matin en me levant – là – devant mon coffre ouvert. Hélas ! Tout a disparu ! Mes billets, mes bijoux. Ils ont osé s’attaquer à une pauvre vieille ! Auraient pu me tuer dans mon lit.

 

À cette éventualité, ses yeux s’arrondirent, et un hululement sortit de sa gorge, qui devint sanglot et crise de nerfs. On la fit asseoir. Le capitaine alla constater dans la salle à manger, le coffre vide, et le corps étendu.

 

Que s’était-il passé ? Manifestement le mort n’avait pas emporté les biens, mais les gants en latex qu’il portait semblaient prouver qu’il avait de mauvaises intentions. Quelqu’un l’avait assommé, et pris l’argent. Pas de trace de lutte. Les meubles étaient rangés. Le coup d’ailleurs semblait avoir été porté à l’arrière. Ce que le légiste confirmera. Le gendarme retourna auprès de la femme qui reprenait son souffle.

 

-          Vous n’avez rien entendu ?

-          Bah, moi quand je dors avec les cachets, on pourrait bien tirer un coup de canon !

-          Mais si, c’est mon abruti de frère ! Ce connard !

 

Le capitaine surpris la regarda. La femme, les cheveux en bataille, avait des yeux venimeux.

 

-          Eh ben ! Ce n’est pas l’amour fraternel – euh – de sœur qui vous étouffe !

-          Voudrez pas que je joue la comédie ? Étions fâchés depuis longtemps !

-          Pourquoi ?

 

La femme se préparait à répondre, mais une onde glissa dans ses yeux et l’expression devint celle d’une femme obtuse, faussement naïve.

 

-          Sais pas ! Quand on est une pauvre femme seule, se mit-elle à gémir, a toujours été une sale bête. Tenez quand nous étions mômes, il…

-          Bon, bon ! Z’allez pas nous raconter votre vie depuis que Jésus Christ était jeune homme !

 

La femme baissa la tête et se mit à renifler en tortillant son mouchoir. La bouche serrée comme la bourse d’un avare. Manifestement, elle ne dirait plus rien.

 

-          Bon, dit le capitaine…

 

À ce moment le légiste, appelé, arriva. Le sol ne lui apprit rien, l’allée en béton ne revêtant aucune marque, le temps avait été très sec… Flûte ! Le cadavre d’un homme d’une soixantaine d’années gisait face tournée sur le côté, l’arrière du crâne plein de sang coagulé. Un lourd tisonnier à côté du corps était manifestement l’arme du crime… Le légiste le prit et l’enveloppa comme pièce à conviction.

 

À ce moment un gendarme appela le légiste et le capitaine.

 

-          Venez voir !

 

Derrière la haie, il avait découvert des mégots de cigarettes…, le sol avait été piétiné. Le légiste les ramassa. Bon ! Plus rien à tirer des lieux. La femme s’était retirée dans un mutisme têtu. Au poste de gendarmerie, en attendant le résultat des analyses du légiste, le capitaine décida de fouiller dans la vie de la femme qui semblait peu porter son frère dans son cœur. Aurait-elle pu porter le coup ? Elle était costaud… Elle prétendait être assommée par des médicaments… à voir !

 

Car enfin, la victime était entrée sans problème… l’avait-elle invitée ? Pas possible, il portait des gants… Donc, elle n’avait pu le voir… De plus, elle prétendait qu’elle laissait toujours une porte ouverte et que son frère le savait. Il se lança donc dans une enquête de voisinage.

 

-          La vieille ? Une sorcière, faiseuse d’emmerdes, dit le voisin le plus proche, ne supporte personne !

-          À déposé plainte parce que je faisais trop de bruit avec ma voiture ! ajouta un autre.

-          Oui, je l’ai vue répandre des clous sur la chaussée

-          Ah ! Dit une femme – oui, pas très sympa, mais elle faisait pitié dans sa solitude

-          N’avait-elle pas de famille, à part son frère ?

-          Personne ne venait jamais… Mais je crois qu’elle avait une fille

-          Et le frère ? Que savez-vous ?

-          Pas grand-chose. Mais allez voir Madame Mathieu, c’est la mémoire du lieu !

 

Madame Mathieu, toute contente d’être une sorte de vedette parla sans retenue.

 

-          Oui, je connais la famille ! Les parents ? Bah ! De gros travailleurs. Deux enfants, fille, garçon, un peu livrés à eux-mêmes. Souvent la sœur devait s’occuper du plus jeune… Cela lui pesait. Va, elle le faisait payer au gamin. Il a pas du rigoler tous les jours. Et puis, il y a eu l’héritage à la mort des parents. Le garçon s’est estimé lésé. En fait, elle a eu la maison, lui la valeur en argent, je crois. Mais panier percé, il a tout claqué en un rien de temps, le jeu, les femmes… Et après, comme la maison a pris de la valeur… Aurait voulu que sa sœur lui donne des sous… Vous pensez bien qu’elle n’était pas d’accord, avare comme elle était. Bref, ça a été la guerre. Haie abimée, culture arrosée de mazout, pierres sur la façade. Les plaintes n’ont rien donné, car pas de preuves…

 

Le gendarme resta pensif. Il ajouta :

 

-          Et sa fille ? Elle a bien une fille ?

-          Ah ! Ouiche ! Autre problème ! La fille est loin, partie très tôt de la maison… En avait marre de la mère pas commode, égoïste – sa fille devait ni plus ni moins que la servir – et d’une avarice à pleurer !

-          Vous savez où elle est ?

-          Peut-être à Paris… Sais pas bien, elle cherchait du travail.

-          Était-elle mariée ?

-          Je ne sais pas… Elle est partie seule en tout cas, avec sa mère, impossible de sortir, de mener une vie normale de jeune c’est-à-dire : bal, virée, la vie quoi !

 

Le gendarme repartit pensif. Donc la paroissienne n’était pas sympathique, ce qui ne l’étonnait pas, l’impression produite n’avait pas été bonne. C’était une haine recuite qui l’animait envers son frère, de plus, elle était une mauvaise mère. Donc la mort de son frère l’arrangeait ! Elle aurait pu payer quelqu’un et tendre un piège à son frère…

Oui, mais comment ?

Apparemment le frère avait attendu derrière la haie, un bon moment… Et si l’assassin était connu de la victime ? Il aurait pu jouer double jeu, être payé par la vieille pour amadouer le frère, lui proposer le casse… et en fait le tuer… Le paroissien avait de sérieux problèmes financiers ! Il avait manifestement cherché de l’argent là où il savait en trouver. Le voisin se plaignit du bruit, certains soirs on buvait, on jouait aux cartes, on se disputait… Mais on n’osait rien dire. Z’avaient pas l’air commode ! C’était un souk pas possible. Il avait été dégommé ? Ben, on ne pleurerait pas. Bon débarras !

 

Le propriétaire, lui aussi, s’avoua soulagé, d’autant plus  que son locataire lui devait plusieurs mois de loyer et un procès était en train... Mais il avait eu la visite d’une petite frappe qui avait essayé de lui faire peur. S’était même plaint à la gendarmerie, mais bah ! Tant qu’y a pas quelqu’un de refroidi, ils ne bougent pas ! Pourtant, il avait retrouvé un jour ses pneus crevés !

 

-          Et l’envoyé menaçant ?

-          Bah ! Un jeune qui jouait les gros bras. Brun, moyen, musclé. Pour le reste, habillé comme tous les autres, avec ces pantalons qu’on dirait qu’ils ont chié dans leur froc.

 

Enfin, un gendarme de son équipe, spécialiste d’informatique, lui révéla qu’il avait pu relever plusieurs "Madame Serviez". Nom de la femme si peu sympathique. Peut-être y aurait-il la fille parmi elles. En effet, après plusieurs recherches, on retrouva la fille. Non, pas à Paris, mais dans la capitale régionale voisine, Montpellier. Elle était seule, avait eu un fils. Elle vivotait en faisant des ménages, d’aides diverses… peut-être un peu de travail au noir. Contactée, elle déclara qu’elle n’avait plus aucun rapport avec sa mère.

 

-          Une sale garce qui l’avait fait chier toute son enfance. Oui, une esclave qu’elle avait été. On devrait interdire à certains de faire des enfants. Aurait été certainement plus heureuse en famille d’accueil.

-          Était-elle capable de tuer cette mère ?

-          Pourquoi pas ? Elle fit la moue. Même si cette vipère était lâche ! Quand il s’agissait de sous ! N’avait jamais fait un cadeau au seul petit enfant qu’elle eût jamais eu ! Cette putain malfaisante. Vous vous rendez compte ? Un seul petit enfant, et non, nada !

 

L’enquêteur aussitôt, ravi de voir apparaître le fils demande :

 

-          Et ce fils ? Où est-il ?

-          Bah ! Sais pas ! Il est assez grand pour se débrouiller seul. C’est pas le petit à sa maman ! Il est intelligent mon Éric.

-          Que fait-il ?

-          Du commerce ! Il gagne bien sa vie. N’oublie pas sa maman. Vé !

 

Et elle montre son doigt orné d’une belle bague. Le gendarme fit mine de l’admirer. La facture, chose surprenante semblait démodée, mais apparemment, elle n’était pas en toc.

 

-          Où est-il ?

-          Sais pas ! Il va et vient, se déplace beaucoup avec son métier, vous savez toujours sur les routes.

 

Le gendarme repartit pensif. Il fallait à tout prix retrouver ce fils si généreux et si riche. L’enquête ne fut pas favorable. Il avait fait des « bêtises » dès son jeune âge. Enfant turbulent, gâté par la mère qui le soutenait en tout. On ne savait pas d’où il tirait son argent, car on ne lui connaissait pas de travail fixe. Fréquentait des gens peu recommandables, jouait au poker. Enfin, on rapporta d’un bijoutier receleur un bracelet ressemblant à l’un de ceux volés chez la vieille.

 

Mis en accusation, affolé par le meurtre accompli lors du vol, il donna le nom du vendeur. Arrêté, lui aussi cuisiné et menacé de complicité de meurtre, après bien des hésitations dénonça le neveu, Éric. C’est lui qui lui avait demandé de garder les bijoux, puis pressé par une dette de jeu, et en butte à des plus forts et dangereux que lui, avait décidé de vendre un des bijoux, plutôt que prévu.

 

Le jeune Éric, arrêté, commença par le prendre de haut. Mais on put prouver que contrairement à ses dénégations – non, il ne fréquentait pas son connard d’oncle, ce demi-sel toujours à sec, qui voulait le taper sans cesse – il l’avait rencontré plusieurs fois avant le « casse ».

Et d’où venait l’argent liquide qu’on avait retrouvé chez lui ? Impossible de prouver où il l’aurait gagné ! Enfin, il finit par avouer.

 

Son oncle en voulait à mort à sa putain de sœur, qui refusait de l’aider et qui l’avait dépouillé… Quant à lui ! Sa grand-mère ! Peuh ! Cette vieille sorcière ! Mais ce froussard ne voulait pas agir seul…

Donc, ils devaient se retrouver devant la maison, cachés dans la haie… Un devait faire le gué – lui, car l’oncle connaissait mieux les lieux – et tenir la voiture prête à partir un peu plus loin. Il devait aussi faire le garde du corps ! Avec cette saleté costaude et enragée, savait-on jamais ! Il rit. L’oncle avait une peur bleue de sa sœur ainée. Il devait encore se souvenir des tannées qu’elle lui prodiguait lorsqu’il était môme ! Ils devaient partager le butin. Mais Éric se dit que finalement c’était injuste ! Après tout c’était sa grand-mère dont il était l’unique petit-fils ! Son seul héritier ! Sa mère lui aurait sûrement tout donné. Pourquoi partager ? Avec ce vieil abruti, après tout il n’avait pas besoin d’argent, à son âge ! Tandis que lui…

 

Viviane 15/02/2013



11/05/2014
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