Maridan-Gyres

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Les Aragnes de Paquerette Davin

Je ne résiste pas au plaisir de vous faire découvrir le troisième roman de Paquerette Davin. Je vous livre ici les premières pages de son ouvrage, j'aimerais que vous nous fassiez part de vos commentaires. Merci par avance à vous tous.

Les Aragnes - Pâquerette  Davin

Prologue

 

Fleuriane sur Caprillante, ses calanques, ses plages, son étang.

Tel est le panneau publicitaire  qui annonce la petite ville qui se blottit au pied des collines crayeuses, en bord de mer.

Fleuriane, au doux nom végétal, qui s’étale sous le soleil provençal.

Fleuriane, 10000 habitants fixes, 50000 l’été. Elle qui fait miroiter l’eau de la Caprillante, petit cours d’eau de quatre-vingts kilomètres, né dans le haut plateau calcaire qui s’étend derrière la falaise dominant la ville.

La plupart du temps, la Caprillante n’est qu’un ruisseau colonisé par des roseaux dont les galopins se moquent en l’enjambant sans respect

Ces » minots » presque tous issus de la Cité Nouvelle, reléguée de l’autre côté de la Caprillante, au Nord, éloignée du bord de mer, distante de Fleuriane de 3Km.

Cette Cité, qu’on aurait bien voulu oublier ; un furoncle bien purulent, la honte de Fleuriane !

Les bâtiments, faute de place, s’étageaient sur les contreforts de la colline. Les habitants bénéficiaient d’une vue admirable sur la mer,  à laquelle ils étaient, à vrai dire, peu sensibles.

Un pont reliait la Cité à la grande route qui descendait de l’autoroute vers Fleuriane , au grand regret des « vrais » Fleurianais.

Si les « indigènes » toléraient les « estrangers » qui habitaient de riches villas, ils n’éprouvaient que mépris pour ceux de la Cité Nouvelle, ramassis de cas sociaux, gens de peu, qui ne vivaient que de secours : paresseux, sales, irresponsables, disaient les Fleurianais

de »souche »

-          Un moulon (tas) de bons à rien, qui vivaient à leurs crochets.

-          Ben oui ! Leurs impôts devaient servir à entretenir ces sangsues.

-          Z’avez vu leurs maisons?  Non sans blague ! Et dire qu’on les plaint d’habiter de vrais trous à rats. Mais qui avait détérioré leurs bâtiments ? Hein ? « Fan des chichourles »,z’étaient même pas capables d’entretenir leur environnement. Malgré les containers-poubelles, ces porcs entassaient leurs « escoubilles » (saletés) sous leurs fenêtres.

Mais oui ! Ils jetaient leurs » bordilles » par les fenêtres, les balcons, trop fatigués sans doute pour les descendre.

-          Bé, devaient préférer rester au lit. Ah ! Ça oui ! Plutôt que de chercher du boulot, et faire des petits ! Ben, les allocations, c’est pas pour des chiens ! Voui, les gosses, ça rapporte.

-          Si au moins, ils les élevaient ! Bah ! Pécaïre ! Livrés à eux-mêmes qu’ils étaient ces « galavards » : voleurs, drogués et compagnie.

Ainsi fulminaient les braves gens du vieux village, fiers de leur enracinement remontant à plusieurs générations. Ils étaient de moins en moins nombreux.

Fleuriane devenait un village-dortoir ; beaucoup de ses résidents travaillaient à Marseille, et aussi un village de retraités, attirés par la beauté du site, la douceur du climat méditerranéen et la proximité de la mer.

Le bourg offrait à ses habitants de multiples loisirs, mais pas de salle de spectacle : Marseille n’était pas loin.

Étant donné le grand nombre de retraités, deux clubs avaient éclos.

Celui des séniors, »les gais lurons » et un autre « les amis fleurianais ».

À vrai dire, les adhérents étaient souvent les mêmes, mais les présidents respectifs ne s’appréciaient pas du tout ; ils n’étaient pas du même parti politique et rêvaient d’étouffer l’autre club.

Ils étaient à l’affût de chaque nouvelle tête, et triomphaient lorsque « le nouveau »choisissait leur propre association.

C’était faire la « nique » à l’ennemi.

Ainsi, Fleuriane était-il un petit concentré d’humanité, avec ses imperfections, ses vices, ses haines , ses jalousies… une sorte de grenade dégoupillée prête à éclater au moindre choc : un évènement imprévu qui allait déranger les habitudes des Fleurianais , et mettre à jour ce qu’il y avait de plus bas dans l’âme de l’homme

à suivre......


 

 

Chapitre I

 

La nuit s’éclaircissait à l’Est ; le soleil se levait peu à peu dissipant les ombres nocturnes. Il annonçait une belle journée de printemps.

Déjà, un rai de lumière venait frapper les volets de la chambre de Josette Dubois.

 

Elle soupira. Encore une nuit passée à se tourner et à se retourner dans son lit. Elle avait un sommeil difficile, entrecoupé de longues plages d’éveil, moments redoutés : les pensées envahissaient toute sa tête ; soucis de la vie quotidienne, le manque chronique d’argent.

Elle n’avait qu’une toute petite pension qui n’augmentait pas, alors que tout le reste, par contre devenait hors de prix.

Bientôt, elle ne pourrait même plus s’offrir ces escapades à la journée, proposées par le club des séniors. Il fallait au minimum dépenser 50 euros. La vie était bien injuste. Avoir trimé pendant des années au service des autres pour en arriver là !

 

Difficile de compter sur les enfants. Ah ! Les enfants ! Les pauvres ! Ils n’avaient pas eu beaucoup de chance… Les temps étaient durs. On ne parlait que de chômage, de fermeture d’usines. Où donc allait le monde ? Bou Diou !

 

Enfin tant qu’elle pourrait encore accomplir quelques travaux de couture… Mais sa vue baissait… Il lui faudrait  peut-être changer ses lunettes. Encore des frais. Pourrait-elle assumer une telle dépense ?

 

Elle s’assit péniblement dans son lit. Aussitôt, une petite ombre dodue se coula sur ses genoux en gémissant ; une truffe humide et fraîche renifla sa main, puis le chien se leva sur ses pattes arrière, appuyant les antérieures sur les épaules de la femme et se mit à lui prodiguer de grands coups de langue affectueux.

 

-          Allez, Gus, bon chien, pitchot couquin, oui, oui, je me lève. 

 

Elle écarta l’animal excité, fit glisser ses pieds gonflés sur le sol. Déjà Gus avait sauté du lit, et attendait, assis, la queue battant la mesure de sa joie à l’idée du nouveau jour qui commençait.

 

-          Tu es bien heureux toi ! Tu n’as pas de soucis. 

 

Elle avait pris l’habitude de parler à son chien, cela allait parfois jusqu’au long monologue.

Ainsi se sentait-elle moins abandonnée, oui, sa solitude lui semblait plus légère. Gus la comprenait, l’obligeait à sortir et même lui servait d’intermédiaire. D’autres « mères » ou « pères » à chiens la saluaient lors de ses promenades avec son petit compagnon. Oui, Gus faisait son bonheur. C’était un rescapé de la S.P.A.

 

Elle avait hésité à l’adopter. Un animal entraîne des frais. Mais lors d’une visite « portes ouvertes », elle s’était laissé attendrir par le regard humble et suppliant du petit bonhomme.

Lorsqu’elle avait fait part de ses soucis concernant les frais éventuels de vétérinaire, on lui avait promis que, si ses revenus étaient insuffisants, on l’aiderait à les régler.

Alors elle avait cédé ; sa solitude était trop lourde ; les jours s’écoulaient mornes, sans but.

Ainsi, Gus avait-il donné un certain sens à sa vie. Son exubérance, sa fidélité et son amour pour sa maîtresse l’avaient arrachée à l’écoulement monotone des jours, une ligne droite dont hélas ! L’issue était prévisible. Elle glissa sur ses chaussons en gémissant. Encore ces douleurs ! Ses articulations craquaient.

 

Le mauvais temps de la veille n’y était pas étranger. Il y avait eu un bel  orage en fin d’après-midi : le tonnerre avait roulé dans le ciel, renvoyé par l’écho. Fleuriane, prisonnière de ses collines et falaises faisait caisse de résonnance. Les orages terrifiaient les vieux Fleurianais qui se souvenaient de catastrophes passées. L’eau s’infiltrait dans le plateau calcaire, rencontrait une couche d’argile et ressortait inopinément en ruisselets qui finissaient par s’unir à la Caprillante. Elle devenait grosse en un rien de temps, la mauvaise, capable de déborder. Après bien des pétitions, des recours, on avait creusé un petit bassin de rétention, bien petit… plus fait pour rassurer que pour sa véritable efficacité. On manquait de place, et puis cette place était chère. Ne valait-il pas mieux la consacrer à des constructions de lotissements… bien rentables ? Et tant pis si le bétonnage empêchait l’écoulement de l’eau. N’était-ce pas le problème de toute la Côte, soumise à une grande pression foncière ? Tout le monde ne rêve-t-il pas d’une retraite au soleil et en bord de mer ?

 

Alors les différents maires accordaient-ils facilement des permis de construire… pariant que la catastrophe n’interviendrait pas... ou serait pour le successeur. À lui de se débrouiller avec le problème. Et puis, les assurances n’étaient pas faites pour des chiens, ces voleuses instituées. Ainsi se rassuraient les édiles, et ils n’hésitaient pas à accorder ces fameux permis, réclamés à cor et à cri par les propriétaires de terrains (des électeurs ou des amis) et même par des acheteurs imprudents prêts à tout pour goûter aux charmes de la vie Fleurianaise.

 

Josette Dubois alluma la faible lampe qui éclairait sa salle de bains-placard. Pas de lumière naturelle dans ce qui n’était qu’un cagibi. : Un lavabo ébréché, une douche, un vieux porte-serviette rouillé, quelques étagères  en plastique le long du mur lépreux. Il aurait sans doute fallu repeindre les cloisons rongées par l’humidité, mais elle ne s’en sentait pas le courage.

Elle actionna la tirette de la lampe au-dessus du miroir. Elle haussa les épaules.

 

-          Hein, mon coco, qu’en dis-tu ? 

 

Le chien la contemplait avec affection, tirant un bout de langue rose ; il semblait dire. Mais non, le physique ne compte pas ! Il n’y a que l’âme ! Et toi tu es bonne ! Ne m’as- tu pas tiré de la prison ?

 

Elle éteignit la lumière. À quoi bon ! Comme si elle ne connaissait pas sa misérable tronche. Non, elle n’était pas belle. L’avait-elle jamais été ? Son visage était bouffi, joufflu, et ridé, ses yeux cernés de poches, non de  valises ! Étaient de couleur banale, marron, un peu globuleux. Son nez épaté se voyait de loin ! Sa bouche, dont les lèvres fines fermaient le bas du visage, comme les cordons d’une bourse, semblait un bec. Elle ressemblait à  une poule déplumée.

Quelle importance ! Elle n’avait plus à plaire ! Fini pour elle le temps des calculs, des projets amoureux, des efforts de conquête.

 

Non, de ce côté-là, elle était bien tranquille ! Un homme dans sa vie ? Pécaïre, elle avait assez donné. Son époux – que Dieu ait son âme - n’avait pas été pire qu’un autre ni meilleur, si elle en croyait les confidences de ses camarades, elle n’osait dire « amies ». Elle l’avait assisté, accompagnée jusqu’à la fin, et cela avait été une délivrance. Alors, recommencer ! Non, elle avait son Gus, les enfants qui venaient la voir de temps en temps… si ce n’étaient ces douleurs… et les soucis d’argent, elle pourrait se considérer comme heureuse.

Après s’être donné un rapide coup de peigne dans des cheveux coupés très courts, cela limitait les frais d’entretien, elle éteignit la lampe plafonnier et descendit l’escalier intérieur menant de la chambre à la partie cuisine-salle à manger.

 

Comme beaucoup d’anciennes maisons du centre du village, la sienne était tout en hauteur. Une entrée sur la rue .donnait directement dans la pièce obscure qui demandait à être éclairée toute la journée. Le soleil, même l’été n’atteignait pas sa fenêtre, très près du sol. C’était la pièce principale : salle à manger-salon : une table à rallonges un peu bancale, un buffet démodé, surchargé de « souvenirs » d’une pauvre vie, quelques photos de famille, des bibelots insignifiants offerts par les enfants résumaient sa pauvre existence. Des gravures punaisées au mur, reproductions de tableaux découpés dans des revues... Les pommes de Cézanne… illustrant une semaine de promotion sur les fruits, un calendrier de la poste représentant un chien, essayaient d’embellir ce cadre qui transpirait la médiocrité. Sur un coin du buffet, une pile de revues prêtées par des amies, vie de célébrités propres à faire rêver « : Closer, Ici Paris, quelques Match.»  Un vieux fauteuil s’effondrait devant une télévision hors d’âge. Josette Dubois s’affaira dans sa mini-cuisine, à l’arrière de la pièce : un vrai couloir, encombré d’une cuisinière antique, d’un frigidaire qui perdait son eau, d’une petite table-banquette sous laquelle Gus trouvait ses écuelles. Une porte donnait sur des toilettes, seul confort de cette maison : cela évitait à la locataire de monter à l’étage…

 

Donc, Josette Dubois prépara son petit-déjeuner, surveillée par Gus, assis sur son arrière-train, la queue battant la mesure. Vite, un café crachoté par l’antique machine, avec deux biscottes dont elle offrit un morceau à Gus en attente. Enfin, elle prit la laisse suspendue au portemanteau. Gus se mit à sauter comme monté sur ressort en aboyant.

 

-          Mais oui, mais oui, mon » pitchot gari »(petit rat), on y va. 

 

Josette Dubois enfila un vieux gilet et sortit entraînée par un Gus déchaîné.

 

L’ondée de la veille avait lavé la rue ; l’air était frais, vivifiant, et le ciel, là-haut, au-dessus des toits de tuiles  roses, ou des terrasses, d’un bleu pâle uniforme. Il allait certainement faire beau, et la nature avait apprécié cette douche revigorante.

 

Josette Dubois avait l’habitude d’accomplir le tour du vieux village. Gus aimait se rendre à l’aire de passage des camping-cars, pour quémander une gâterie ou dire bonjour à des congénères vacanciers. Il était au comble de la joie si le camarade canin se révélait une gentille demoiselle canine !

 

L’aire était située en bordure de la Caprillante, en direction de la Cité Nouvelle  à un kilomètre de la ville; elle était prévue pour une dizaine de véhicules, et comportait peu d’aménagements pour inciter les voyageurs à poursuivre leur route. Ainsi, pas une ombre, dans une région, l’été, écrasée de soleil. Mais à vrai dire, les terrains de camping, plus ou moins luxueux, étaient nombreux dans les environs. Ce matin de fin mars 2013, l’aire n’était occupée  que par un seul véhicule. C’était une bizarrerie les vacanciers n’étaient pas encore arrivés. Que venait faire cet étranger, ainsi hors saison ?

 

Les habitués rongeaient leur frein dans leurs villes, pris par leur vie futile qui leur permettait d’oublier le temps qui passe inexorablement et l’approche de la fin. Oui, continuer à se noyer à la recherche du « plus » qui prétend donner un sens à la vie, ce « plus » qui correspond la plupart du temps à des objets, gadgets, effets de mode, proposés par notre société de consommation effrénée… et il fallait de l’argent pour se procurer les derniers « smartphones », tablettes, ordinateurs… et ceux ne pouvant pas se les offrir, faute de revenus suffisants, passaient leur temps pleins de rancune et de haine, persuadés d’être les victimes de cette société duale.

 

C’est ce qu’avait compris Jacques Labiol. Il en avait eu assez de se tourmenter pour le lendemain. Il avait tout laissé tomber, à un an de la retraite, et était parti depuis sa Haute-Saône pluvieuse, de Vesoul plus exactement, avec son camping-car vers des cieux plus cléments. Il avait toujours été attiré par la « Grande Bleue ». Il la connaissait pour être venu sur ses bords en vacances, du temps des jours heureux.

 

Ne pas y penser… Cela faisait toujours mal… il avait les yeux embués…

 

Tout à coup une truffe humide se posa sur sa cheville, des reniflements : une petite masse poilue frétillait à ses pieds.

 

-          Gus ! Gus ! Reviens ! Coquin ! 

 

Il baissa les yeux sur le petit animal qui faisait le beau. Était-il drôle, avec une oreille dressée et l’autre tombant sur l’œil, son petit museau quémandeur dont s’échappaient d’infimes gémissements, ses babines retroussées sur un semblant de sourire aimable.

 

-          N’ayez pas peur ! Il n’est pas méchant.

-          En effet, il a l’air bien sympathique.

-          C’est un bon garçon, très sociable, mais aussi intéressé ! Il a senti l’odeur de votre déjeuner, ce gourmand. 

 

L’homme sourit, donna une légère tape amicale sur la tête de Gus, puis lui offrit un morceau du cake entamé

 

-          Mais on est un brave toutou, hein ? Oui, tu es beau ! 

 

Manifestement l’inconnu aimait les chiens, Gus ne s’y était pas trompé, et couinait de joie.

Cela émut la vieille dame, si attachée à son petit compagnon. Cet individu devait avoir « bon fond », le chien ne commettait jamais d’erreur. Elle le détailla avec plaisir. Un homme pas très jeune, ni trop vieux, en tout cas plus jeune qu’elle… une chevelure abondante et blanche. Ah ! Au moins, celui-là, il n’est pas chauve, se dit-elle. Beaucoup des « vieux » du club, qui survivaient à leurs compagnes… ils étaient rares… arboraient des crânes dégarnis et luisants.

 

Celui-ci présentait une silhouette svelte, là aussi elle apprécia. Il n’avait rien d’un Bibendum !

Les vieux qu’elle connaissait étaient soit bedonnants, soit décharnés, de vrais épouvantails ! Sa myopie lui interdisait d’entrevoir plus de détails. La voix de l’homme était agréable, cependant il n’avait pas « l’assent » du Midi. Cela ne la surprit pas, venant d’un voyageur au véhicule immatriculé 70, ainsi qu’elle avait pu le constater.

 

Les Fleurianais étaient habitués à voir défiler chez eux des gens de la France entière, et aussi de l’étranger : italiens, allemands, hollandais, espagnols, belges, anglais, suédois… et même polonais et tchèques. Oui, toute l’Europe venait leur rendre visite. Les commerçants ne s’en plaignaient pas, eux ! Les « indigènes » souriaient moins.

Bonne Mère ! Il fallait faire la queue dans tous les commerces, et les prix augmentaient quand les touristes s’abattaient sur Fleuriane, comme sauterelles sur un pauvre champ dévasté. Pourtant, ce numéro 70 lui était inconnu. Les habitants de ce département  étaient peu nombreux à venir à Fleuriane. Elle essaya de le retrouver. Voyons, voyons, le 69, c’est Lyon, ça elle le savait : beaucoup de Lyonnais venaient à Fleuriane, par autoroute, ils ne mettaient guère plus de trois heures (en dehors de l’affluence de l’été…) Alors, le 70 ? Aucune idée ! Elle ne voyait pas… Elle osa questionner cet aimable voyageur qui manifestement aimait les chiens. Gus, couché sur le dos, pattes avant repliées, offrait son ventre à de tendres « papouilles ».

 

-          Excusez-moi, je suis peut-être indiscrète, mais le 70, c’est quoi ?

-          La Haute-Saône ! 

 

Comme sa questionneuse restait perplexe, il ajouta.

 

-          En Franche-Comté. À côté de Besançon.

-          Bou Diou ! Que c’est loin ! Peuchère, c’est le Nord. Pour sûr le soleil, vous ne devez pas le voir souvent.

-          Vous savez, dit-il en souriant, il ne faut pas exagérer. D’abord, c’est l’Est, et non le Nord…y’a plus haut sur la carte. Bon, bon, vous avez quand même raison. Il pleut beaucoup. Mais cela a son charme. C’est très vert ; l’eau est abondante : rivières, lacs. C’est très reposant.

-          Ah ! Bon ! Vous savez, moi, le vert, la pluie, le ciel gris, je crois que je déprimerais… 

 

L’homme ne répondit plus à Josette Dubois, il semblait plongé dans ses pensées. Alors la bavarde appela Gus et s’éloigna, impatiente de parler de sa rencontre à ses vieilles camarades à l’affût de la moindre nouveauté.

 

Elle se sentait heureuse, trottinait en oubliant presque ses douleurs. Elle avait quelque chose à dire. Cet homme, elle en était sûre, était intéressant. Pour une fois, ce serait elle, l’importante, dans la petite communauté des vieux fleurianais qui leur apporterait sujet à commenter et les sortirait, elle en était sûre, de leur apathie.



26/01/2015
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