Atelier 14 - 2020 - sujet 2
Depuis trop longtemps, il les mettait dans une situation compliquée.
Cinq ans déjà que ses infidélités répétées, ses déboires sentimentaux, ses frasques cachées avaient altéré leur complicité et abîmé la confiance qu'elle lui portait.
Insidieusement, il avait laissé sa frustration de mâle quarantenaire en mal d'une vie légère franchir le seuil de leur maison et son insatisfaction chronique éclabousser leur gai bonheur de vie de famille nombreuse.
Elle et lui avaient tout tenté, même fait un placement immobilier, qui la sécurisait et qui était un refuge pour la progéniture déboussolée qu'elle tentait de protéger.
Mais, leurs différents avaient dissous chaque tentative de retour au temps passé, au temps où, insouciante et naïve, elle pensait vivre le bonheur simple d'une famille aisée.
Ils avaient tenté de consulter un psychologue de couple. Mais le dialogue n'avait pu s'installer. Alors qu'elle lui reprochait maîtresses et chaudes escapades, il rétorquait que le ménage de la maison n'était pas assez bien fait !
Car oui, depuis qu'elle avait appris que son mari était un insatiable volage, écrivant par là-même la préface de leur douloureuse séparation, il s'était réfugié dans cette unique plainte, l'entretien de la maison. Ces échanges mensongers l'avaient blessée, comme des épées qui la transperçaient.
Elle savait que la propreté de la maison n'était qu'une inconsciente ruse, un moyen de partager cette faute trop lourde pour lui être exclusivement imputée. Ainsi, il n'était plus l'unique responsable de leur destruction programmée.
Elle savait surtout que son involontaire aveuglement à se focaliser sur ce fallacieux problème les empêchait de parler de ce qui consumait leur couple.
Elle, souveraine sur la maison et l'éducation de leurs enfants, avait durement lutté pour sauver ce mariage, si précieux à ses yeux. Elle avait crié, pleuré, menacé, pardonné, séduit à nouveau, surveillé, aimé encore, jalousé mais jamais, elle n'avait accepté. Car c'est ce qu'il voulait pour eux deux, lui, libre, libertin, désagréable à souhait et elle parfaite femme au foyer soumise et résignée.
Insensiblement, elle comprit que son combat était vain, que sa lutte se solderait irrémédiablement par leur rupture car contraindre son mari à la fidélité était contre-nature. Bien évidemment, elle ne pouvait pas le changer !
Ne lui disait-il pas que le mariage était une des plus grande escroquerie de l'histoire ? Qu'un «bon avocat» arriverait sans doute à faire disparaître cette institution millénaire en pointant ses clauses scandaleusement abusives?
Naïvement, elle avait pensé que peut-être, toutes ces difficultés étaient la conséquence du trèfle à quatre feuilles qu'elle s'était permis de jeter une fois fané. Méritait elle d'être si fortement condamnée pour son incrédulité face à cette superstition surannée?
Quoi qu'il en soit, un jour vint où elle prit cette décision forcée.
Un jour vint, à la faveur d'une nouvelle imposture, où sa colère fut si grande qu'elle partit déposer une demande de divorce auprès d'un avocat spécialisé.
Elle avait décidé de ne plus être une femme trompée. Elle avait décidé de ne plus avoir peur de sa situation de femme au foyer. Elle avait décidé de ne plus l'entendre dire qu'il ne l'avait jamais aimé.
Aujourd'hui?
Lui, seul, de temps en temps avec son amie, sa régulière comme il dit, entre deux périodes où celle-ci ne rompt pas avec lui.
Elle, seule, les enfants partis, triste de ces trente ans finis, tentant de reconstruire sa vie, dans l'espoir d'une nouvelle liberté chérie.
Myrtille
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