Maridan-Gyres

C’est l’été, mais nous ne partons pas comme tous les ans à la mer. L’arrivée de notre nouveau petit frère est imminente. Il fait très chaud, les adultes appellent ça la canicule. Nous passons nos journées en culottes à prendre des bains. Notre baignoire s’est transformée en piscine mais ce n’est pas facile pour Maman avec son gros ventre !

Papounet et Mamounette proposent de nous prendre dans leur maison à la campagne. Nos parents nous rejoindront ensuite avec  le nouveau petit frère.

Nous arrivons dans le village et leur maison aux volets rouges nous attend bien fraîche. Les cigales et grillons rivalisent de cri-cris et tsst-tsst. Le soir venu, ce sont les grenouilles qui prendront la relève. La chaleur est telle que la terre se craquelle et l’air vibre de chaleur au-dessus des champs de blé.

Nous vivons la majeure partie de la journée dehors et bientôt nos peaux de citadins prennent de jolies couleurs dorées. Les cousins, habitant à deux pas, nous rejoignent souvent l’après-midi.

Mon frère et moi dormons dans la même chambre. Au petit déjeuner nous dévorons de belles tartines de pain de campagne, à la croûte bien croustillante, recouvertes de miel ou de confiture maison. Nous devons ensuite faire notre toilette, ranger la chambre et nous habiller.

Puis, direction le jardin où nous aidons Mamounette. Nous profitons des températures plus clémentes pour ramasser haricots verts, tomates, courgettes. Nous nous régalons avec les abricots, fraises et framboises mais nous devons remplir nos petits paniers. Les fruits rouges seront soit dégustés avec du sucre et un nuage de chantilly, soit transformés en confitures. Mamounette est la reine de la tarte salée ou sucrée. Moi je préfère les sucrées ! Elle sait aussi faire les glaces avec des fruits qu’elle appelle sorbets. Ma préférée est celle au cassis, mon petit frère fait la grimace quand il la goûte.

Papounet a un rucher et nous emmène chacun notre tour voir ses amies les abeilles. On doit mettre un drôle de chapeau avec une voilette, une combinaison et des gants pour ne pas se faire piquer. Les abeilles ne nous connaissant pas, il faut rester calme, ne pas faire de grands gestes et parler doucement. Papounet nous donne à déguster des alvéoles, il les appelle les rayons de miel. Nous croquons à pleines dents dedans, on dirait une petite gaufrette gorgée de miel. Miam !

Un temps calme vient après le déjeuner. Papounet fait la sieste en ronflant très fort, ce qui nous fait beaucoup rire. Nous en profitons pour lire, dessiner ou écrire une lettre à papa et maman.

Un peu plus tard dans l’après-midi, Mamounette remplit une immense bassine en zinc avec l’eau du puits à l’ombre du vieux figuier.

On adore notre piscine. Avec les cousins, quelle rigolade ! On s’éclabousse, on saute dedans. Parfois on s’assoit tous serrés comme des sardines en nous racontant des histoires de pirates,de bateaux, de baleines et de requins. On finit souvent par battre des pieds en nous aspergeant et en riant aux éclats. Papounet , sous la tonnelle avec son chapeau de paille et ses mots croisés, est censé nous surveiller en buvant son café. Il nous regarde jouer avec une lueur malicieuse dans le regard. Lors de disputes, il prend sa grosse voix et nous filons doux. Il fait un peu peur.

En fin de baignade, nous défilons devant Mamounette qui nous asperge avec le jet pour nous rincer. Au début c’est bon, l'eau est chaude mais très vite elle devient froide. Des cris stridents se font entendre et notre grand-mère finit bientôt aussi mouillée que nous. Elle fait semblant de rouspéter, mais je crois qu’elle est ravie car elle est rafraîchie.

Nous rejoignons la tonnelle pour le goûter où nous attend du pain avec une barre de chocolat fondant accompagné de citronnade bien fraîche. Ensuite vient la corvée d’épluchures des légumes ou fruits ramassés le matin et la cuisson des confitures ou de la ratatouille. Nous aimons aussi pétrir la pâte à pain ou la pâte à tarte. Nous finissons tous collants ou recouverts de farine.

Le soir, après le dîner, nous profitons des baisses de températures pour aller nous promener. Papounet prend son bâton et nous montre le chemin. Mamounette ferme la marche, encourageant doucement les plus lents. La vie reprend doucement après l’écrasante chaleur. Des odeurs de lavande, herbe mouillée et jasmin embaument la nuit tombante. Les batraciens prennent le relai des cigales et leur chant s’élève. Pendant les haltes, on s’installe autour de Papounet qui nous raconte de merveilleuses histoires palpitantes. Nous sommes suspendus à ses lèvres.

C’est un conteur hors pair !

Nous retrouvons avec plaisir notre lit et nous sombrons de suite,  de doux rêves nous attendent.

La Reinette