Maridan-Gyres

Maridan-Gyres

Dualité

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Tout est toujours à recommencer, nous dit le Sage.

Personne ne peut faire l'économie du chemin.

 

Il regarde cet homme au centre, les yeux fixés sur son nombril.

Tragiquement séparé de sa vérité.

 

Il dit : « Voilà ce qui arrive à tous, voilà ce qui arrive à certains ».

Et nous raconte,

 

 

« Il était une fois, un homme gris à l'âme rougeoyante. Une âme qui, très tôt, dès la sortie du ventre, perdit son feu pour prendre à son compte et malgré lui le poids de l'ignorance.

Il était une fois, une vérité solide et attachante, à l'âme discrète et juste.

 

L'homme-enfant, sauvage, commença sa vie en s'accrochant aux branches.

À la façon du singe, il imita. Le père, la mère, le frère. Et poussé par un ardent désir de plaire, se mit à boire le lait de leurs paroles, à avaler les fleurs de leurs couleuvres.

Grandit encore, fréquenta de longues heures les plus grands professeurs. Ouvrit trop de livres et se perdit. Sous trop de mots, sous ceux des autres.

 

Vînt un jour où il crut qu'il savait et qu'il était temps pour lui d'enseigner. Alors il fit des enfants et orchestra leurs vies.

Se posa en maître, sans rien transmettre.

Prit le pouvoir, quitta la réalité. Monta si haut que, privé d'ombre, il fondit sous le soleil.

Ainsi éclairé, on vit mieux cet homme fou, cet homme faux.

Et plus il parla fort, moins il parla vrai.

Sous sa parole vide, aucune racine.

Rien d'intime.

 

On vit l'imposture et on s'éloigna.

L'homme incendié et rejeté resta seul.

S'accroupit, referma sur ses genoux ses bras.

 

C'est à ce moment-là que la vérité vînt pour frapper et demander

-« Que fais-tu assis par terre, homme gris? Qu'as-tu fait de ton feu, il t'a brûlé !

 

J'ai toujours vécu ainsi, répondit l'homme gris. Au cœur de la dualité, assis entre le noir et le blanc. Sans penser.

 

La vérité reprit:

Sors donc la tête de tes livres, sors donc la tête de tes bras. Descends de la  position haute et invincible que tu occupes. Reviens vers moi, reviens vers nous. Accorde ta pensée à ta parole, ta parole à ton cœur.

Lâche les branches, laisse-toi tomber. Abandonne la cime et retrouvons-nous dans l'abîme. Peut-être feras-tu, au milieu de la nuit, meilleur usage de ton feu. »

 

Pour finir, le sage ajouta : « Cette rencontre-là peut prendre du temps. Beaucoup de vies. Il faudra du courage à l'homme pour oser être soi, trouver sa vérité sans l'imposer, se décentrer. »

Frédérique



12/11/2013
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