Maridan-Gyres

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Sujet N°2 - Atelier 7 – 2018 – Ronde des mots

 

Destin en friche

 

Ce soir je n’arrive pas à m’endormir, hantée par un souvenir, ou plutôt un cauchemar, vieux de deux ans déjà. Je ne dors pas alors je prends ma voiture et roule au hasard des routes. Soudain, deux ronds luisants dans les phares : une belette est immobile devant les roues, tétanisée par ce monstre motorisé qui surgit dans la nuit. J’éteins les phares, elle retrouve ses esprits et prenant les pattes à son cou, disparait dans les fourrés bordant le bitume.  

 

Je ferme les yeux et je revois mon âme sœur, l’amour de ma vie, mon complice des jours heureux, alité dans cette chambre d’hôpital lugubre. C’était un dimanche. Nous étions allés au zoo. Et puis un coup de fil. Ce coup de fil de son supérieur pour lui annoncer que le départ était pour le lendemain. Retour à la maison, préparation rapide du paquetage et dernière soirée en duo. Demain, c’est la participation à une guerre dans un pays que nous ne savons même pas situer sur la carte.

- « Tu m’écriras n’est-ce pas ? Je me rendrai tous les jours au guichet postal de la base, je guetterai tes lettres. »

Un dernier signe, un dernier regard, une larme écrasée en regardant le bateau s’éloigner. Mon corps se vrille, ma tête devient lourde et douloureuse : impression coup du lapin. Quelques jours plus tard, on m’annonce qu’Hugo est rapatrié d’urgence après avoir sauté sur une mine. Il est dans un sale état, pas beau à voir.

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J’avais mis le réveil pour sauter dans le premier train et me rendre à l’hôpital militaire où mon homme était pris en charge. Lorsque j’arrivais, la sirène de la caserne des pompiers toute proche retentissait, les ambulances effectuaient leur ballet incessant devant l’entrée des urgences. Allais-je pouvoir passer la porte ? Je fus accueillie par une équipe soignante fort bienveillante.

- « Serai-je apte à accompagner mon mari dans sa lente reconstruction ? » demandai-je

- « Vous le serez. Primo vous n’avez pas le choix, deuxio vous deux, vous êtes liés par quelque chose d’unique. Vous vous en sortirez »

 

C’était il y a pile deux ans. Dans quelques heures, le retour à la maison, le retour à la vie.

 

© Ouvrez les Guillemets 63 – 15.04.18



16/04/2018
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