Maridan-Gyres

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Atelier N°11 - 2018 1er sujet

Tous les mêmes !

 

En ce premier jour de l’été, le soleil revenu, j’ai envie de vous raconter une histoire. Une vraie. De celles qui font douter sur les intentions des protagonistes et vous amènent à écouter tantôt votre cœur tantôt votre raison pour deviner où le scénario va vous emmener.

 

Pourquoi justement aujourd’hui ? Parce que l’été est propice aux rencontres, aux aventures de toutes sortes, au lâcher prise. Parce que l’été, les sentiments libérés de leur carcan vagabondent plus joyeusement que n’importe quelle autre saison. C’est du moins mon avis. Quelle menace y a-t-il alors à se laisser aller, à se croire fréquentable, désirable, admirable ?

 

Gabrielle était une jeune femme de 28 ans, une parisienne pur jus qui avait choisi la côte méditerranéenne pour se reposer d’une année exténuante dans la société de courtage où elle occupait les fonctions de manager de proximité. Un milieu d’hommes où il lui avait fallu s’imposer progressivement. Elle sentait régulièrement des regards se poser sur elle de façon insistante et choper une partie de son anatomie qu’elle dévoilait savamment sous des corsages ajustés ou des jupes légèrement fendues. Combien de fois avait-elle rêver d’attendre ces voyeurs dans un coin sombre à leur sortie du bureau, de les surprendre, de les immobiliser grâce à une prise de close combat dont elle avait le secret et de leur serrer le cou à l’aide de l’une des ceintures de cuir fines qui soulignaient joliment sa taille ? Juste pour voir comment leurs regards lubriques croiseraient le sien au moment précis où elle comprimerait davantage la lanière de cuir sur la pomme d’Adam arrogante.

 

Toute l’année elle jouait un personnage. Celui de la cadre bien sous tout rapport qui se devait d’entretenir des relations professionnelles avec ses clients, de mener ses équipes vers les objectifs commerciaux du groupe américain qui l’employait. Elle animait des réunions, faisait rédiger les comptes rendus à son secrétaire, concevait des stratégies de développement agressives. Etait-elle à ce point malade pour accepter ce rythme effréné ?

 

Là, sur cette plage encore déserte où la lumière matinale caressait doucement le sable non encore foulé de milliers de pas d’estivants pressés, elle dégustait son café en alignant ses yeux sur l’horizon. Elle pensait à ce trentenaire, peintre en bâtiment, qu’elle avait rencontré la veille au soir sur le marché nocturne de la place aux arbres. Il lui avait fait belle impression, avait engagé la conversation sans se montrer trop intrusif, s’était montré galant au moment de la raccompagner dans son bungalow. Elle s’était imaginé l’espace d’un instant construire sa vie avec lui, faire des enfants, revenir à des fondamentaux qu’elle avait depuis longtemps oubliés.

 

Au moment de refermer la porte sur son intimité et ses rêves de midinettes, elle s’était retournée et avait surpris un regard, CE regard appuyé qu’elle ne connaissait que trop bien. Et un discret filet de salive aux commissures des lèvres.

 

Ce soir, lorsqu’il viendrait la chercher pour l’emmener diner, elle mettrait sa robe noire, celle avec de la dentelle sur les côtés. Elle n’oublierait pas sa ceinture de cuir…

 

© Ouvrez les Guillemets 63 – 22.06.18

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28/06/2018
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